mercredi 26 septembre 2018

Comment élire son gouvernement?

J'aurais bien aimé trouver l'image d'une urne québécoise,
mais elles semblent toutes soumises à des droits d'auteur...
Les élections québécoises auront lieu lundi prochain, et j'ai même déjà voté, même si tant Qc125 que Too close to call m'affirment que, dans ma circonscription, mon vote ne sert finalement à rien, puisque les jeux sont faits depuis longtemps. Les votes ethniques, vous vous souvenez? Alors, avec 28% d'anglophones...

Comme trois des quatre partis présents à l'Assemblée nationale lors de sa dissolution ont promis d'introduire un système de vote proportionnel compensatoire, avec 75 députés élus comme actuellement au vote uninominal à un tour et 50 députés de liste élus pour établir la représentation proportionnelle,  je crois qu'il est temps de discuter des modes de scrutin.

J'ai déjà (ici et ) émis de fortes objections contre la représentation proportionnelle (et un peu aussi contre le système uninominal à deux tours), système dans lequel le pouvoir repose encore davantage dans les mains des exécutifs des partis que maintenant. En fait, si on pousse la logique de ce système jusqu'au bout, on n'aurait même plus à avoir de députés: il suffirait de donner à chaque parti un poids égal au nombre de voix qu'il a reçues (ce qui règlerait en plus les problèmes mathématiques posés par ce genre d'élections), un peu comme lors d'une assemblée générale d'actionnaires, et régler le tout entre quelques personnes.

Alors, par quoi remplacer notre système? Et pourquoi ne pas essayer quelque chose de nouveau

Vote par approbation

Ne nous le cachons pas, nous votons avant tout pour un parti et un gouvernement. Bien des gens ne comprennent d'ailleurs pas que c'est l'Assemblée nationale et non le peuple qui élit le gouvernement. Par ailleurs, un système comme celui des États-Unis, dans lequel le chef d'État et aussi le chef d'un gouvernement dont les ministres, appelés secrétaires, doivent être entérinés par le sénat, présente aussi des problèmes. Alors, pourquoi ne pas voter pour une équipe de gouvernement? Et pourquoi ne pas utiliser le vote par approbation? Dans ce système, on peut voter pour autant de personnes — ou ici, d'équipes — que l'on veut. Il s'agit d'indiquer tous les choix qui nous satisferaient, et celui qui reçoit l'approbation du plus grand nombre d'électeurs serait élu.

Ce mode de scrutin aurait plusieurs avantages. Le gouvernement aurait nécessairement l'approbation d'un très grand nombre d'électeurs; il serait relativement centriste, quel que soit le centre dans une société donnée à un moment donné; il diminuerait donc le poids des groupes extrémistes, qui ont souvent, dans un système proportionnel, une importance démesurée; et le scrutin n'amènerait pas un clivage social, comme on voit aux États-Unis, par exemple. De plus, en présentant des équipes, on pourrait connaitre d'avance qui serait ministre des Finances, de l'Éducation, de la Défense ou de la Santé, et on pourrait organiser des débats thématiques entre ces candidats. Actuellement, on peut bien supputer qui serait ministre dans le gouvernement de tel ou tel parti, mais cela reste au choix du premier ministre et encore faut-il que la personne pressentie soit élue dans son comté!

Évidemment, il faudrait prévoir ce qui se passerait si un ministre démissionnait ou mourait, mais ce sont des choses qui se règlent. On peut d'ailleurs imaginer qu'après trop de changements, un gouvernement devrait déclencher de nouvelles élections, ou laisser l'appréciation de la situation à l'assemblée.

Et l'assemblée?

Évidemment, il faut aussi une assemblée. Il faut adopter des lois, voter des budgets, interroger les ministres. On pourrait toujours en revenir au scrutin proportionnel (et pourquoi ne pas donner à chaque électeurs plusieurs droits de vote?), ou encore se reposer là aussi sur le vote par approbation (mais à moins d'élire, comme aujourd'hui, une personne par circonscription, ce système nécessite alors des calculs très compliqués, qui risquent de semer le doute dans l'esprit des gens), mais je crois que deux instances revendiquant toutes les deux la même légitimité démocratique ne feront que se disputer.

C'est pourquoi je propose la stochocratie, aussi appelée lotocratie. Il s'agit ni plus ni moins de tirer au sort les membres de l'assemblée. Comme pour un jury. On aurait enfin une assemblée vraiment représentative de la population, et non plus dominée par des avocats (et aujourd'hui des médecins, semble-t-il).

En fait, ma première idée était celle de cette assemblée tirée au sort, qui pourrait ensuite choisir un gouvernement, comme on le fait actuellement, mais sans exiger que les ministres soient d'abord députés. Mais cela enlèverait tout pouvoir politique à plus de 99,99% de la population, c'est-à-dire à tous ceux qui ne seraient pas choisis, et l'absence du droit de choisir son gouvernement pourrait bien avoir de funestes conséquences.

Évidemment, le tirage au sort des membres de l'assemblée présente de nombreux problèmes, en premier lieu le risque que les députés ne soient facilement embobinés par de beaux parleurs. Mais je crois qu'il faire confiance aux gens. La plupart du temps, du moins.

Mais le principal avantage est que cette assemblée prendrait finalement des décisions très proches que celles que prendraient l'ensemble de la population s'il pouvait longuement s'informer, discuter et échanger sur les questions de politique.

Les membres de l'assemblée pourraient bien inviter dans leurs discussions des représentants de divers groupes politiques, qui pourraient avoir ou non le droit de vote. Ils pourraient aussi inviter des représentants de divers groupes d'intérêt à présenter leurs points de vue, un peu comme cela se passe actuellement en commission parlementaire. Et on peut imaginer que les députés auraient une formation, du moins dans les premiers mois de leur mandat, voire avant de l'entreprendre, pour les aider à s'y retrouver.

Une chose est sûre: on mettrait fin à l'inceste que représentent trop souvent les travaux parlementaires dominés par le parti au gouvernement...

Finalement, une des tâches de l'assemblée serait aussi d'élire le président ou la présidente du Québec, dans le cas où il s'agirait d'une république du Québec

Comme je l'ai mentionné, je crois qu'il faut éviter que deux instances soient choisies par le même corps électoral. Et je crois aussi qu'il faut séparer les fonctions de chef de gouvernement et de chef  d'État, même si celles de ce dernier sont le plus souvent surtout protocolaires. C'est le que le rôle d'un président ou d'une présidente peut devenir important en cas de crise: ce serait à cette personne de dissoudre le gouvernement ou l'assemblée en cas de blocage ou d'actes anticonstitutionnels, et on pourrait bien imaginer que l'imposition d'un état d'urgence nécessite l'approbation de deux personnes, le président et le premier ministre, plutôt que celle d'un gouvernement dominé par un seul parti et par son chef.

Je sais que ce que j'avance a peu de chances d'être réalisé, mais pourquoi ne pas mettre sur pied, dès maintenant, des simulations de vote par approbation, comme cela s'est déjà fait en France, et une assemblée de gens tirés au sort, pour voir les opinions que ces personnes pourraient mettre de l'avant?

lundi 3 septembre 2018

L'éducation gratuite, une fausse bonne idée?

Au cours de cette campagne électorale, au moins deux partis politiques — Québec solidaire et le Parti vert du Québec / Green Party of Quebec — proposent la gratuité de l'éducation. Dans l'absolu, je suis pour cette mesure, bien qu'elle impose sans doute de mettre en place de nouveaux mécanismes pour réguler l'admission à l'université. Mais dans le cadre du régime fédéral actuel, d'autant plus que ce régime n'est pas remis en cause par le PVQ/GPQ, je dois émettre des doutes importants. D'ailleurs, même QS ne dit pas clairement si l'indépendance du Québec serait un préalable à la mise en place de cette proposition.

C'est que les frais de scolarité — et les frais de garderie, d'ailleurs — sont déductibles de l'impôt fédéral. Moins les Québécois paieront de frais, plus ils paieront d'impôts à Ottawa, impôts dont au moins 75% seront dépensés dans les autres provinces. Le fait que les Québécois paieraient ces frais via leur impôt national — ou provincial, si vous y tenez — n'aurait aucune incidence sur l'impôt fédéral à payer: seuls les frais de scolarité directement payés pour soi ou ou ses enfants sont déductibles.

Pour 1000$ de frais en moins, on paiera donc environ 125$ d'impôt fédéral de plus, pour une perte sèche d'environ 100$ pour le Québec, population et gouvernement confondus.

De plus, voyez-vous, tout porte à croire que le Québec subventionne déjà fiscalement le reste du Canada (pour les détails, je vous recommande de lire Un gouvernement de trop, par Stéphane Gobeil, chez VLB Éditeur). Même si ce n'était pas le cas, ne faudrait-il pas éviter qu'une mesure sociale se solde finalement par une sortie nette d'argent vers les autres provinces? Sommes-nous si riches? Tenons-nous à payer une plus grande part de l'oléoduc acheté par M. Trudeau?

En fait, la solution, d'ici l'indépendance, ne serait-elle une fiscalisation des frais de scolarité, comme c'est déjà le cas pour les frais de garde en milieu non subventionné? Rappelons que, selon son revenu, ces frais sont remboursés jusqu'à 75% lors de l'émission du rapport d'impôt national. Le tout sans que cela affecte la déductibilité au niveau fédéral de la totalité des frais payés.

Les piétons d'abord?





Cette image représente une vue aérienne de la station de métro Rosemont (merci à Google), que l'ai longtemps fréquentée pour aller à mon travail de mon domicile. Comme je partais de cette station en contre-pointe, pour ainsi dire, j'avais assez peu de choix dans mes autobus et je devais souvent utiliser la ligne 25 Angus. On voit en noir le chemin que je devais utiliser pour aller de la station (en fait, j'arrivais par l'autobus 161, qui me laissait sur le boulevard Rosemont, à l'extrême gauche de la photo; je devais donc aussi traverser l'édicule du métro) au point de départ de cette ligne. Il est évident qu'il aurait été beaucoup plus rapide de traverser directement, mais c'est interdit et il y a d'ailleurs une clôture au centre de l'aire gazonnée. Il est aussi interdit de passer par ce qui est au bas de la photo, et des policiers étaient souvent là pour le rappeler.

Le tout, évidemment, au nom de la protection des piétons.

Comme dans beaucoup de cas, je crois qu'on a agi à l'envers. On a d'abord conçu la station pour faciliter le passage des autobus, et seulement ensuite a-t-on pensé à intégrer les piétons dans le portrait. D'où le passage-piétons unique à l'entrée/sortie de la boucle.

Il me semble que la logique, dans une optique de valorisation du transport actif (et ne serait-ce que pour éviter à des usagers de rater leur autobus à cause d'un trop long trajet à parcourir, d'autant plus que bien des usagers des TEC ont des problèmes de locomotion), aurait été de faire traverser les piétons directement devant la sortie de la station, quitte à ajouter un autre arrêt obligatoire au centre de la boucle. Qu'en pensez-vous?